Le 5 octobre dernier, j’interrogeais la ministre de l’Intérieur concernant la circulaire sur l’interdiction préventive de manifestation.
Madame la ministre,
Il y a quelques mois, j’avais pu interroger votre collègue en charge de la Justice au sujet d’un avant-projet de loi dite « anticasseurs » qui, selon la presse, était en discussion au sein de vos cabinets respectifs. En date du 6septembre, vous avez indiqué avoir pris une circulaire permettant aux bourgmestres, dans certaines conditions, d’interdire préventivement certaines personnes de manifestation. Cette annonce appelle quelques questions.
Je m’interroge premièrement sur le choix du véhicule choisi. Il était préalablement question d’un avant-projet de loi, qui est effectivement l’outil adéquat pour restreindre des libertés fondamentales car il fait intervenir le Parlement, cette « assemblée délibérante démocratiquement élue », selon les mots bien connus de la Cour constitutionnelle. Or, vous avez finalement oeuvré par circulaire ministérielle, ce qui évacue le débat démocratique que nous aurions pu mener au sein du Parlement autour de la question. Je le regrette assez vivement.
Le choix d’une circulaire paraît également audacieux au regard de son contenu, qui paraît réglementaire voire législatif plutôt que simplement interprétatif. La base légale interpelle : tirer de l’article135, §2 une possibilité pour les bourgmestres d’interdire – préventivement – à des personnes de manifester semble une interprétation particulièrement extensive, ce qui pose la question du respect du principe de légalité pour cette restriction envisagée.
Ensuite, le choix d’opter pour une mesure de police administrative s’accompagne dans la circulaire d’une série de garanties, qui sont évidemment les bienvenues. Mais cela présente, malgré tout, une série de risques, au premier chef celui de s’écarter du principe général prévalant en Belgique d’un régime constitutionnel répressif –sanctionnant a posteriori–plutôt que préventif en matière de libertés fondamentales.
Je m’interroge également sur la question des indices concrets requis pour décider de la restriction. Pouvez-vous nous donner davantage d’informations sur la nature de ces indices ou informations ? Faut-il qu’une personne exprime clairement sa volonté de nuire, dans des termes non ambigus ? Quelles seraient les sources acceptées de ces informations ? La police locale ou fédérale, la Sûreté de l’État, d’autres sources ?
Enfin, la question de la surveillance des personnes concernées n’est bien sûr pas anodine. J’aimerais également obtenir plus d’informations à ce sujet.
Retrouvez l’ensemble des questions jointe ainsi que la réponse de la ministre
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