Le 11 octobre dernier, je déposais une question écrite au ministre de la Justice concernant l’arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles du 12 septembre 2022 dans l’affaire N.T.

Pour la cinquième fois depuis 2019, la justice belge, par le biais de l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 12 septembre 2022, donne raison à N.T. et ses conseils.

Dans cet arrêt, la cour d’appel de Bruxelles a une nouvelle fois constaté la violation du principe non bis in idem, le droit de N.T. à en obtenir le respect par l’État belge, la violation du principe de spécialité de l’extradition ainsi que la violation de l’autorité de chose jugée. Cet arrêt constate également la violation des articles 3 et 34 de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).

Il ordonne la réparation du préjudice subi non seulement par une indemnisation pour la détention passée mais également pour la détention future aux États-Unis, par la prise en charge de ses frais médicaux et par l’indemnisation de l’invalidité permanente causée. De surcroît, l’arrêt du 12 septembre 2022 enjoint au gouvernement de solliciter son retour, au vu de la gravité des fautes commises et du préjudice subi.

Des organes belges et internationaux de respect des droits humains se sont prononcés à plusieurs reprises dans cette affaire, toujours dans le même sens.

  • La CEDH a sévèrement condamné la Belgique pour avoir extradé N.T. sans attendre son arrêt.
  • Le rapporteur spécial des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et la rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste ont décrit les terribles conditions de détention de N.T. aux USA dans une interpellation au gouvernement belge le 16 décembre 2020.
  • Une seconde interpellation a été adressée aux États-Unis d’Amérique, le 25 février 2022, cette fois non seulement par ces rapporteurs spéciaux mais également par le Groupe de travail sur la détention arbitraire et le rapporteur spécial sur le droit à la santé physique et mentale.
  • Le 29 septembre, la Ligue des Droits humains et la Liga voor Mensenrechten ont communiqué dans le même sens et ont indiqué solliciter une nouvelle rencontre avec vous-même et votre collègue en charge des Affaires étrangères.

Cette fois, l’État belge a été condamné en responsabilité à débourser des sommes importantes pour indemniser N.T., sommes qui continueront à s’accumuler tant que dure l’inaction de l’État belge, puisqu’elles concernent aussi les années de détention à venir. Une démarche très simple permettrait pourtant à l’État de réparer le préjudice en nature, et d’ainsi enfin mettre fin à cette saga judiciaire où les choses sont tranchées depuis 2009 et où pourtant, à quatre reprises pour l’instant, l’État belge n’a pas suivi les injonctions de la Justice. Il s’agit de l’envoi d’une nouvelle note diplomatique officielle indiquant clairement que l’extradition de N.T. avait été refusée pour les faits déjà jugés en Belgique.

C’est dans des cas tels que celui-ci que notre attachement à l’État de droit se voit testé ; il doit résister au test, ses principes ne peuvent s’appliquer à géométrie variable.

  1. Pouvez-vous clarifier votre position quant à ce refus d’exequatur ?
  2. L’extradition de N. T. a-t-elle ou non été refusée pour les faits commis et jugés en Belgique ?

Retrouvez la réponse du ministre

Photo@Darrell Godliman